Retour en France et bilan

Je suis à quelques heures de mon vol retour et il temps pour moi de tirer un bilan de ma dernière mission au Bénin. Je suis arrivé à récolter 3 200 € auprès de mes amis et relations qui lisent ce blog et contrairement à ce que je faisais auparavant (qui consistait à envoyer des containers de France), je suis venu dépenser sur place le fruit de cette collecte.
Cette idée est la bonne et je crois avoir trouvé la bonne solution pour aider efficacement ce petit pays que j’ai découvert maladroitement il y a 3 ans.
En faisant ainsi, je fais travailler tout une économie locale en évitant d’engraisser la mafia du port qui exige de toucher sa commission pour chaque retrait de container. Je suis également certain de la bonne utilisation de ces sommes puisque je détiens la carte bleue qui règle les dépenses. Pas de frais de gestion avec moi : chaque centime d’euro est dépensé en fournitures utiles à la population.
A chaque nouvel achat, je pensais à mon petit neveu Arthus qui a cassé sa tire-lire pour me remettre ses 10 € patiemment économisés ou bien à ma fille qui m’a remis un billet de 5 €. Je voulais pouvoir leur dire dans les yeux que pas un euro n’avait été perdu inutilement.
Au final, j’ai acheté 738 mètres de tissu pour habiller 514 enfants, 150 kilos de lait maternel fabriqué sur place dans une coopérative qui achète à des groupements de femmes agricultrices. Ainsi, 7 familles vont gagner de l’argent grâce à mon investissement dans leur production. Je leur ai également pris des biscuits au soja riches en protéines (947 doses !). Ajoutez à tout cela, 520 stylos Bic, 104 boîtes de géométrie, 532 cahiers, 104 livres de conjugaison et 10 cartons de 100 craies et vous aurez un compte précis des dépenses opérées sur place pour un total de 2 080 000 francs CFA (3 200 € au taux de conversion local qui est de 1 € = 650 francs CFA).
Vous verrez prochainement les images que j’ai tourné là-bas… c’était touchant, déroutant et gênant pour au moins un des villages où la distribution a eu lieu dans un désordre total entraînant une bagarre autour de boites de lait en poudre. C’était de la folie, vous n’imaginez pas la scène auquel j’ai assisté et que j’ai filmé. Eugène m’a demandé de ne pas la diffuser car il en avait honte : je l’ai détruite.
Un bénévole a préféré s’éloigner pour ne pas assister à cette empoignade où les femmes sont devenues animaux en quelques secondes. C’était assez humiliant de voir le responsable de ce village jeter à la population qui se pressait, mains tendues en avant, de quoi nourrir leurs enfants. On aurait dit un fermier jetant des graines à une basse cour affamée.
J’ai réussi à interrompre ce pugilat momentanément pour expliquer comment devait se passer de bonne manière une distribution alimentaire, avec des listes de noms, des croix en face de chacun… On m’a regardé, on a opiné du chef mais je ne suis pas certain qu’ils aient compris.
Ajoutez à cela, des “audiences privées“ que l’on sollicitait auprès de moi en baissant la tête en signe de déférence. Là commençait le long chapelet de leurs besoins, de leur détresse, de leur misère qu’ils me demandaient de combler : “je voudrais une lampe torche pour rentrer de l’école le soir“, “je voudrais aller chez le médecin mais je n’ai pas les moyens. Je suis blessé au bras depuis un an et je ne peux plus travailler au champs“, “je voudrais un téléphone portable“, “je voudrais un livre de mathématiques“, “je voudrais des chaussures fermées“, “je voudrais des lunettes car je ne vois pas le tableau“, “je voudrais…“ Un enfant que j’avais eu comme élève il y a 3 ans a fait 2 heures de marche pour me voir mercredi et me demander… une lampe torche. Il est reparti le soir chez lui… 2 autres heures de marche l’attendaient mais il les a fait éclairées à la lueur d’une lampe torche.
J’ai fait ce que j’ai pu, distribuant ça et là ce que je pouvais, promettant, faisant patienter… j’ai distribué aux plus méritants les téléphones portables qu’une amie m’avait confiés, j’ai laissé mes vêtements et même ma paire de Timberland ! Je suis arrivé là-bas avec une valise de plus de 21 kilos et je repars avec un bagage en faisant à peine 11…
Je rentre exténué, harassé, mais assez content d’avoir pu être l’ambassadeur de tous les donateurs qui en France et à Hong Kong m’ont permis de réaliser quelques rêves d’enfants africains. Qu’ils en soient ici remerciés. Vous avez fait du bien à des gens qui n’en ont plus.