La beauté du travail manuel

56568958Hier soir, j’ai pelé des pommes de terre. Je sais, on dirait du Marguerite Duras mais c’est du Jeff Carias, désolé. Donc, je disais que hier soir j’ai pelé des pommes de terre et cela a provoqué chez moi un tas de réflexions. Je pensais que cette opération culinaire me viderait la tête et remplirait mon estomac mais c’est allé bien au-delà ! Je recevais des amis à diner et j’avais décidé de leur faire mes fameuses “frites maison“ avec un rôti de bœuf. Si ce plat, simple au demeurant, est fort gouteux, il n’est malheureusement pas sans inconvénient. L’odeur en est le principal. A chaque fois, je dois changer tout le mobilier du salon et brûler les rideaux. Marie, mon assistante, n’a pas manqué de m’en faire la remarque ce matin en entrant dans mon bureau : “ça pue la frite ici !“… Bel accueil, non ? L’air contrit, je me suis discrètement reniflé ne comprenant pas comment l’odeur de friture avait pu me suivre jusqu’à mon travail et je trouvais l’explication en reniflant le bas de mon pantalon… C’était celui que je portais hier soir durant ma “Frites Party“… J’ai eu beau aller m’asperger de désodorisant au citron dans les toilettes, la frite a remporté haut la main son combat contre l’agrume.

Depuis ce matin, je suis l’objet des quolibets de mes collègues de travail qui font des jeux de mots vaseux avec le mot “frite“ ou qui me demandent de me tenir à bonne distance d’eux quand je leur parle. Imbéciles. S’ils savaient que hier soir, j’avais compris un tas de choses grâce au pelage de pommes de terre… En effet, je me suis fait une ampoule à l’index. Une ampoule ! Il faut dire que j’ai pelé 2,5 kg de tubercules et que ça use, mais quand même… J’ai réalisé, avec cette ampoule, combien je n’étais pas manuel et que je ne faisais JAMAIS travailler mes mains. Taper sur un clavier, oui, mais monter une table IKEA ou peler des patates, non.
A la télévision, il y avait un agriculteur qui criait sa détresse et appelait à l’aide le gouvernement pour sauver les agriculteurs d’un sort funeste et de dresser le chiffre impressionnant des suicides dans la profession. A ses côtés, il y avait un Ministre de l’Agriculture complètement déconnecté qui, à la question “vous savez ce que représente un hectare ?“ a répondu “oh vous savez, je suis nul en maths“… Moi, mes patates et mon ampoule, on était un peu consterné devant autant de médiocrité car, outre le fait qu’il ne sache pas ce que représente un hectare, il ne semblait pas meilleur sur la question de l’aide à apporter aux paysans qui se battent seuls face à la grande distribution. Voilà un beau métier manuel : paysan, me suis-je dit alors que je plaçais un pansement sur mon bobo.
Je me suis senti, l’espace d’un instant, frère de combat avec cet émouvant agriculteur. Je comprenais sa douleur et j’en ressentais même les effets dans ma chair… Enfin, nuançons : ce que j’éprouvais pour la première fois depuis longtemps, était le quotidien de cet homme. Il semblait avoir des ampoules dans le cœur, ce pauvre homme aux larmes dans les yeux. On le sentait à bout de nerf, fatigué de se battre et de crier dans le vide. Il m’a touché et je me suis dit que les problèmes de ceux qui travaillent avec leur cerveau ne sont peut-être pas aussi graves que les siens.
Ce soir, je ne vais pas partir trop tard du bureau car je me suis lancé un nouveau défi : écosser des petits pois. Je le ferai en regardant les Simpson, c’est moins déprimant.

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