L'angoisse du vide

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Vous avez de la chance de ne pas être un artiste ! C’est une place qui n’est pas facile à tenir tous les jours et si certains la tienne pour un métier en or, je peux vous révéler aujourd’hui que ce n’est que du plaqué.
Je traverse une période de doute alimentée par l’approche à la vitesse subsonique des dates des représentations théâtrales de la pièce “Temps Mort“ que nous jouerons pour la première fois dans un mois à Monaco et dans 6 semaines à l’Espace Julien…
Je n’ai pas dormi la nuit dernière, rêvant que le rideau s’ouvrait sur une salle vide. Enfin, non, pas exactement : il y avait 5 ou 6 amis assis au milieu de la salle, trop peu nombreux et suffisamment à l’aise pour s’adresser à nous pendant que nous jouions : “parle plus fort, Jeff !“, “ton lacet est défait, Bruno !“ hurlaient-ils en riant de bon cœur de nous voir en si mauvaise posture.
Vous ne pouvez pas imaginer comme ce métier est angoissant. Certes, il présente l’avantage de ne pas se faire braquer par des multirécidivistes en scooter mais quand même. On ne sait JAMAIS de quoi demain sera fait. On stresse de ne pas avoir de boulot à l’horizon et tout à coup, on vous demande si vous êtes disponible pour animer un événement pour BMW, un film pour High Co et on vous demande de rédiger “en urgence“ un message pour un spot radio, d’écrire 2 scénarios pour des films publicitaires ainsi que votre avis sur une “reco“ d’agence pour un client national.
C’est un peu comme si vous marchiez seul sur un chemin boueux de la Creuse et que soudain un bolide s’arrêtait à votre hauteur pour vous prendre en stop et vous emmener à Ibiza. On ne le voit jamais arriver ce putain de véhicule et vous avez intérêt à ne pas être allé pisser derrière un arbre quand il passe ! On rêve d’un trafic dense qui nous donnerait à choisir le véhicule dans lequel on montera mais le quotidien est fait de routes désertes le long desquelles on piétine en guettant d’hypothétiques phares au loin, sous une pluie battante (il pleut très souvent dans la Creuse).
Pourtant les raisons de se réjouir sont là : j’adore littéralement enregistrer les émissions d’ “Ils Font le Sud“ qui me permettent d’approcher tous les poids lourds politiques de la région tout en conservant ma “patte“ matinée d’impertinence et d’irrévérence. J’adore préparer ces questions qui fleurent avec l’insolence et la diffamation tout en ne franchissant jamais la ligne blanche.
Mes invités sortent tous du studio abasourdis et heureux d’avoir participé à une émission “différente“ où les questions sortent des sentiers battus et où ils peuvent parler d’eux et non pas de leur programme. Samia Ghali (ce soir à 20h15), Patrick Mennucci, Henri Jibrayel, Eugène Caselli et Christophe Masse, j’ai reçu tous les candidats à la primaire PS (à l’exception de Marie-Arlette Carlotti qui n’était pas libre) et j’ai déjà reçu l’accord de tous les chefs de partis locaux pour venir s’assoir face à moi (sauf Gaudin qui n’est pas encore officiellement candidat). C’est amusant de regarder tous ces directeurs de cabinet et responsables de campagne, ces attachés de presse me demander avec force tous les horaires de diffusion de l’émission et les responsables Web (ils en ont tous un désormais) prendre des photos de leur poulain avec moi pour les afficher sur leurs blogs de campagne.
Lundi, France 3 vient filmer une répétition de “Temps Mort“ à l’Espace Julien et nous allons faire l’objet d’un numéro entier de l’émission culturelle de France 3 “Petit bain de culture en Méditerranée“ présentée par Viviane Karsenty.
Bref, il y a un tas de choses positives qui m’arrivent mais cela n’empêche pas l’anxiété de tapisser de noir ma boîte crânienne. Il est difficile, je trouve, de vivre toutes ces émotions seul et il est évident que la vie de couple présente de sérieux avantages quand on traverse ce type d’épreuves. Pour l’artiste en tout cas car pour l’autre… c’est une autre affaire ! Qui voudrait vivre avec un artiste ? C’est un enfer, je le sais fort bien. On est trop égoïste pour penser à l’autre. L’artiste souffre de ne pas être assez aimé par un public exigeant et parfois fuyant et l’amour de sa compagne ou de son compagnon parait dérisoire en comparaison. Je sais aujourd’hui que c’est faux.
Voilà pourquoi j’écris moins en ce moment. Trop de questions en suspens. Trop de réponses en attente. Mon avenir peut être radieux ou brumeux suivant la météo du public et je suis dans le même état que celui qui se trouve devant sa penderie en ne sachant pas comment se vêtir. En attendant, je reste nu…

22 Responses
    1. Oui, vous avez tous raison sur vos commentaires mais je crains fort que cette angoisse ne disparaisse qu’au moment où je ferai mon entrée sur scène. Ce qui est rassurant (et encore, c’est relatif), c’est que nous jouerons devant deux salles pleines à Monaco. J’ai appris hier soir que c’était déjà complet, un mois exactement avant la première. Ceci dit, la salle est petite…

    1. Je ne crois pas que mon angoisse soit liée aux ventes. Bien sur, c’est important pour le producteur que je suis mais si les billets sont tous vendus, viendra alors l’angoisse de l’artiste : les gens ne vont-ils pas se sentir floués ? Vont-ils passer une bonne soirée ?

  1. Lolobuz

    hapé par un tourbillon de gloire , vous changerez de vie , faisant table rase du passé et vous deviendrez une star intouchable 😉

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